L’élevage de la génisse commence avant même sa naissance. En effet, la gestion du tarissement et de la préparation au vêlage de la mère jouent un rôle très important sur le démarrage de la génisse. Toutefois, il reste encore de nombreuses étapes à réussir dans l’élevage de la génisse pour assurer sa future carrière laitière. Ce dossier présentera quelques repères techniques pour réussir la phase naissance – sevrage et abordera les questions de sélection des génisses à élever pour le renouvellement du troupeau en phase lactée ainsi que les outils à disposition de l’éleveur pour faire ses choix.
Importance de la prise de colostrum
A la naissance, la génisse naît avec peu de réserves corporelles et sans défenses immunitaires. Elle est, par conséquent, sensible au froid et aux agents pathogènes. Un bon démarrage du veau commence dès sa naissance via un vêlage sans complications, un milieu propre et sec, à l’abri des courants d’air. La prise de colostrum dans les quatre premières heures de vie à hauteur de 3-4 litres est essentielle. Pour atteindre une bonne immunité, la génisse doit absorber au moins 200 g d’immunoglobulines dans l’intestin. Or, le pourcentage d’absorption réduit fortement au cours de temps devenant quasiment nul 24 heures après la naissance.
Un bon colostrum contient au moins 80 g d’immunoglobuline par litre de lait représentant 25% brix (unité du réfractomètre). Un colostrum moyen contient quant à lui 50-80 g d’immunoglobulines soit 22-25% brix. Le trou immunitaire a lieu entre 7 jours à 3 semaines d’âge.
Source : GDS Creuse, 2009
Le trou immunitaire correspond au croisement des courbes entre l’immunité liée au colostrum et celle développée par la génisse. C’est durant cette période que la génisse est la plus sensible aux pathogènes. Cela implique de la prévention pour limiter les contamination (isolement du veau, température adéquate, à l’abri des courants d’air, désinfection des cases …).
La carrière d’une vache laitière est dépendante de son niveau de croissance entre 0 à 6 mois et plus particulièrement de 0 à 2 mois. Il est donc nécessaire de réduire au maximum les risques de contamination infectieuse à cet âge.
Qualité de l’alimentation lactée
La croissance en phase lactée dépend en grande partie de la qualité de l’aliment lacté et de l’apport de concentrés. Une poudre de lait de qualité présente un niveau de protéine brute à hauteur de 21-24%. Ces protéines sont, pour une partie, d’origine laitière (poudre de lait écrémé, lactosérum, protéine lactosérum) et pour l’autre, d’origine végétale. Il faut un maximum de protéines d’origine laitière en raison du faible niveau de digestibilité des protéines végétales sur les premières semaines de vie de la génisse. La teneur en lactose doit être proche des 50% et la teneur en matière grasse inférieure à 18%.
Concernant le lait entier, ce dernier doit présenter des valeurs de protéines et de matières grasses les plus stables possibles. Attention tout de même aux excès de matière grasse dans le lait entier. Au-delà de 38 g de TB, il faut diminuer l’apport de lait entier de – 0.5 L de lait pour 4 points de TB en plus.
Concentrés et fourrages en phase lactée
Pour stimuler la croissance et le développement du rumen, l’apport de concentrés est à distribuer à volonté, dès l’âge de 2 semaines. Il faut près de 3 semaines d’apport de concentrés pour permettre à la génisse de les valoriser correctement. En raison de son appétence, la présence de maïs grain dans la ration d’une génisse en cours d’alimentation lactée stimule l’ingestion de concentrés. Un aliment à 18% d’azote, à 1 UFL et une teneur en cellulose brute inférieure à 10% est adapté au besoin de la génisse en croissance. Cela correspond à un mélange de 70% de céréales – 30% de tourteaux de colza ou 80% de céréales – 20% de tourteau de soja ou encore 50% de maïs grain – 50% de pois. Les apports d’un complément minéral à raison de 20 g par jour et d’eau à volonté pour les génisses sont nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme et aux besoins de croissance.La qualité du foin présente peu d’impacts sur la croissance, d’où la possibilité d’un apport de foin grossier pour les six premiers mois de vie. Il faut, en particulier, que ce dernier apporte de la structure pour limiter le risque d’acidose en raison de la forte quantité de concentrés. La capacité du rumen représente de 2% du poids vif. Ainsi, une génisse pesant 100 kg a une capacité d’ingestion de 2 kg d’aliment solide. Or les besoins en UFL sont plus importants que la capacité d’ingestion du veau d’où la nécessité d’un fort apport énergétique.
Réussir le sevrage
En pratique, le sevrage peut être réalisé dès que le veau consomme au moins 2kg de concentrés par jour. En élevage conventionnel, il aura lieu autour de 8 à 12 semaines. Le tour de poitrine référence au sevrage est de 105 à 110 cm (85 à 100 kg de poids vif pour les repères en poids).
Pour les veaux de petit gabarit à la naissance et qui présenteraient des difficultés à rattraper ce retard, le sevrage peut s’envisager dès qu’ils ont doublé leur poids de naissance et qu’ils consomment 2kg de concentrés. Néanmoins, il est important de retarder le sevrage si le veau a été malade ou s’il ne consomme pas encore les 2kg de concentré.
Par ailleurs, l’accumulation des stress (changement de bâtiment et/ou d’environnement, écornage…) est à éviter au maximum pour assurer une bonne croissance post sevrage. Un sevrage est réussi lorsque le gain de poids est identique avant et après le sevrage.
Choisir ses génisses de renouvellement pendant la phase lactée avec la sélection génétique : choix économique et pratique
Le génotypage est une technique qui, en élevage laitier, permet d’identifier les allèles d’un individu pour les caractères morphologiques, fonctionnels et de production dont on connaît l’emplacement sur le génome. Cela s’appuie sur une biopsie (cartilage de l’oreille) ou une prise de sang. Cette technique permet d’obtenir dès les premières semaines de vie, une estimation de la valeur génétique des femelles (index) très fiable (niveau de CD de 0,50 à 0,70 contre 0,25 à 0,30 pour des index sur ascendance)
Cette technique permet à l’éleveur d’accélérer le progrès génétique de son troupeau en apportant de la fiabilité sur les index. Cela favorise la sélection des meilleures génisses pour le renouvellement. Elle permet par ailleurs, de réaliser dès la première gestation un accouplement fin de ces animaux. Bien que la SAM ait un coût, elle est vite amortie. Elle permet une meilleure maîtrise du taux de renouvellement et, par conséquent, une maîtrise des frais d’élevage par animal productif. De plus, la carrière de chaque individu se retrouve améliorée par le biais du nombre de lactation avant réforme (index reproduction, santé, production) et de la production par lactation.
Le potentiel génétique de l’animal ne pourra s’exprimer en totalité que si les conditions d’élevages sont maîtrisées En conséquence, une génisse ayant eu des problèmes de croissance au cours de son élevage, ne pourra exprimer correctement son potentiel laitier et morphologique.
Claire Couzon, Conseillère technique d’élevage – Spécialisée Génisses
claire.couzon@evajura.com
Sources :
GDS de la Creuse, 2009 : http://www.gdscreuse.fr/wp-content/uploads/2012/01/08_4-Plan-de-pr%C3%A9vention-des-diarrh%C3%A9es-n%C3%A9onatales.pdf
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