La transition vers le printemps et la fonte de la neige en altitude révèlent les premiers dégâts causés par les campagnols. Certaines zones sont très infestées et laissent présager une saison de pâture et de fauche particulièrement compliquées. Même si l’année 2021 a permis la constitution de stocks de fourrages conséquents, ces derniers ne seront peut-être pas suffisants pour faire face dans les zones les plus touchées.
Les campagnols terrestres sont les principaux ravageurs des prairies, en particulier des prairies permanentes. Ils se nourrissent des racines des plantes, détruisant le couvert en place. En conditions favorables (présence de galeries, absence de prédateurs ou de maladies, bonnes conditions climatiques…) leur reproduction est explosive : un couple au printemps pourra générer 100 individus à l’automne. Ces phénomènes de pullulation sont cycliques. La durée d’un cycle est de 5 à 7 ans, dont 2 ans de pic de pullulation. Durant ces phases, il est possible d’observer la destruction partielle ou totale des prairies touchées.
Comment lutter efficacement contre les campagnols ?
Il existe plusieurs leviers pour lutter contre les campagnols, notamment celui de favoriser la prédation naturelle : belette, hermine, renard, chat sauvage, buse variable, chouette effraie, héron cendré… Il s’agira alors de maintenir ou d’implanter des zones boisées, de mettre en place des perchoirs mais aussi de chercher une végétation plutôt rase à l’automne (par le pâturage ou la fauche) afin de favoriser l’accès des prédateurs.
Le type d’exploitation de la prairie a aussi son importance. L’alternance fauche/pâture est notamment préférable à la fauche seule. Le piétinement des animaux va favoriser l’effondrement des galeries, de même que le(s) passage(s) d’un rouleau s’il n’est pas possible de faire pâturer les animaux.
La lutte directe par piégeage est aussi envisageable, à condition que la population ne soit pas déjà trop développée.
La réussite de ces méthodes se joue aussi dans la période d’action. Il est nécessaire d’agir au plus tôt, en sortie d’hiver, avant le début de la phase de reproduction. Une intervention en pleine phase de pullulation sera couteuse et inefficace. Préférez une mise à l’herbe précoce des animaux (dès que la portance le permet) dans le cas du pâturage.
Que faire en phase de pullulation ?
Malheureusement, en phase de pullulation il n’est généralement plus possible d’agir efficacement. Il s’agira alors de réparer les dégâts occasionnés sur la prairie en pratiquant le sursemis ou le resemis de la parcelle (quand c’est possible). Cela peut être l’occasion de gagner en qualité de flore sur des prairies dégradées.
Plusieurs points de vigilance sont à prendre en compte avant d’investir dans la réparation de la prairie. Il sera nécessaire d’identifier si la phase de pullulation des campagnols est terminée ou non. Dans le cas où elle ne le serait pas, d’autres dégâts les années suivantes seront à prévoir. Il faudra alors préférer un sursemis « provisoire », en utilisant des espèces en pur ou des associations simples de courte-durée. Celles-ci sont moins couteuses et permettront tout de même de gagner en valeur alimentaire. La rénovation de la prairie avec des mélanges plus complets sera possible en phase de « déclin » (après la pullulation). Le choix des espèces à implanter devra quoiqu’il en soit prendre en compte la flore restante, le mode d’exploitation de la parcelle et les conditions du milieu.
Les techniques et le soin à adopter au semis ou sursemis seront à réfléchir en fonction des dégâts occasionnés sur la parcelle. Plus la parcelle sera touchée, plus il faudra apporter de rigueur et de moyens à l’implantation.
Comme toute intervention de ce type, la réussite dépendra tout autant des conditions météo post-semis ou sursemis. Pari risqué donc, mais qui peut s’avérer gagnant.
Lucie BLANC, Conseillère technique d’élevage et spécialiste prairie
Sources : ADCF, Agridea
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